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Préambule

Au hasard des Arts…

Un blog pour tous, pour rêver, partager une découverte, un regard, donner envie de voir, revoir, savoir, et même chercher, s’interroger, s’insurger, s’étonner, s’émerveiller…
Franchement, ces arts, quel bazar !!!

Le hasard des Arts, n’est pas véritablement un hasard, si ce n’est qu’il sera dicté par l’aléatoire
du livre que j’aurai lu,
du film que j’aurai vu,
de l’expo que j’aurai découverte
de l’émotion que j’aurai ressentie pour un poème, une toile, une sculpture...

Et que sais-je encore ?
Nous allons découvrir et partager, tout cela ensemble.
Des évènements dictés par l’actualité, mais aussi par la découverte ou la redécouverte d’un artiste, d’une œuvre.


Je vous livrerai ainsi le fruit de mes réflexions, de mes engagements, et de mes combats …
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mercredi 3 février 2016

Un bel été à évoquer pour les "Cœurs en hiver"

Un bel été à évoquer pour les “Cœurs en hiver”

C’est un magnifique poème d’Hésiode, à lire dans l’œuvre “Les travaux et les jours”. Une poésie lyrique qui parle du vin et qui me plait beaucoup… Elle a été écrite en Grèce  entre le 8ième et le 7ième siècle avant Jésus-Christ.
Hésiode poète grec du 8ième siècle avant Jésus-Christ

Evidemment, la version originale est encore plus belle… Rêvons avec ces mots traduits qui pourtant trahissent toujours un peu !


Laissons-nous bercer par cette évocation enchanteresse…

« Quand fleurit le chardon et quand la cigage bruyante
perchée sur un arbre, répand, au battement pressé de ses ailes,
sa sonore chanson dans les jours pesants de l’été,
alors les chèvres sont plus grasses, le vin meilleur,
les femmes plus ardentes et les hommes plus las.
Sirius leur brûle la tête et les genoux,
la chaleur leur sèche la peau.
Alors puissè-je avoir l’ombre d’une roche, du vin de Byblos,
une galette bien gonflée et du lait de chèvres […]
Et là-dessus, puissè-je, pour boire le vin ardent, m’étendre à l’ombre,
le cœur satisfait de mon festin,
le visage tourné au souffle vif du Zéphire,
et puisant à une source intarissable et courante que rien n’a troublé,
verser pour trois parts d’eau une part de vin”
(H : ope… 582, 596)

Le jeu de Kattabos, un jeu à boire dans la Grèce Antique


Sirius est une étoile très lumineuse, peu éloignée de nous, « seulement » à huit années lumière. Du fait de sa déclinaison, Sirius n’est jamais très élevée au-dessus de l’horizon depuis les latitudes tempérées de l’hémisphère nord. Beaucoup observée pendant l'Antiquité, l'apparition de Sirius à l'horizon peu avant l'aube indiquait aux Egyptiens l'arrivée des inondations du Nil et datait le début de l'année nouvelle.

Monastère de la Pantanassa fondée en 1428 et toujours habité par des religieuses


Vous retrouverez la version expliquée de cette oeuvre en tapant ceci dans votre moteur de recherche :
https://books.google.fr/books?isbn=2876734419
2006 - ‎Aménagement du territoire - Histoire
C'est dans les Travaux et les Jours d'Hésiode que l'on trouve sans doute l'un ... moment : « Quand fleurit le chardon et quand la cigale bruyante, perchée sur un ...

Sifnos Apollonia - troupeau de chèvres

Et puis, pour le soleil et la chaleur de l’été en Toscane, la même chose mais en italien…. !!!

Una poesia lirica che parla anche del vino e che a me piace molto. Fu scritta in Grecia da Esiodo tra  VIII e il VII secolo a.C., tratta  da "Le opere e i giorni".  Naturalmente la versione in lingua originale è molto più bella ma come spesso si dice "tradurre" è un po' come "tradire":

“Quando il cardo  fiorisce e la cicala canora
posata sull'albero versa l'acuto canto,
continuo, da sotto le ali, durante il tempo dell'estate faticosa,
allora pingui sono le capre e più buono il vino,
più lascive le donne e più fiacchi  gli uomini
cui Sirio inaridisce la testa e le ginocchia,
e la pelle è secca per la calura.
Allora che io abbia l'ombra di una rupe, e vino di Tracia
e dolce pane e latte di capre[...]
e bere sopra vino nero.
Sdraiato all'ombra, sazio il cuore di cibo,
il viso rivolto al vivido soffio di Zefiro,
e da una fonte eterna, fluente e non torbida
prendere tre parti d'acqua e versarvene una di vino.”


Sirio è una stella molto luminosa vicina a noi,  è lontana  "soltanto" otto anni luce. In questo periodo è ben visibile nel cielo notturno guardando verso Est. Era molto osservata durante l'Antichità. L'apparizione di Sirio all'orizzonte poco prima dell'alba indicava agli Egizi  l'arrivo delle inondazioni  del Nilo e dava inizio al nuovo anno.

Chemin pavé sur la route de Mystra - Grèce

Merci à Maguy mon amie,

Soirée du 31/12/15 et 01/01/16 














A Julia Merenda, Janus en son miroir...

A Darius le chat de Firenze qui aime tant les siestes sous les oliviers des collines de Fiesole.

































mardi 8 septembre 2015

L'Annonciation de Cortone peinte par Fra Angelico

L’Annonciation de Cortone peinte par Fra Angelico

L'Annonciation de Cortone avec la prédelle- 1433-1434 -
Fra Angelico

Je voudrais, vous parler d’une Annonciation de Fra Angelico, précisément celle de Cortone à une centaine de km de Florence, en Italie … 
Dans toute Annonciation, moment relaté dans les Evangiles, l’Ange Gabriel vient annoncer à Marie le choix du Seigneur. De nombreux peintres ont illustré ce moment de l’histoire sainte, Fra Angelico a peint plusieurs Annonciations, mais c’est celle de Cortone qui nous intéresse, aujourd’hui déposée au musée diocésain de cette ville.
Guido di Pietro né à la fin du 14ième siècle, mort dans le milieu du siècle suivant, entre en religion, à l’âge de 20 ans chez les Dominicains au couvent de Fiesole situé sur les hauteurs de Florence. Selon l’usage de l’ordre, il change de nom pour celui de Fra Giovanni da Fiesole.
S’il est un religieux très tourné vers la spiritualité, c’est aussi un excellent peintre. Au cours de sa vie, il a décoré des églises et des couvents à Florence, Sienne, Cortone, Orvieto, Rome. On l’appelle Fra Angelico en raison de la grande quantité d’anges reproduite dans ses peintures.… Ses productions sont uniquement dévotionnelles, on dit qu’il priait toujours avant de peindre.
Il travaille à fresque, une peinture murale dont la réalisation s’opère avant que l’enduit ne soit sec ou à la détrempe sur bois, des couleurs broyées mélangées avec un liant comme la gélatine. Ces techniques demandent une grande maîtrise, car on ne peut pas retoucher le travail comme on le fait plus facilement dans la peinture à l’huile, méthode qui n’existe pas en Italie à cette époque…pas plus qu’on ne peint sur toile mais sur bois !
Vers les années 1409, à l’époque du schisme des Papes de Rome et d’Avignon, Fra Angelico et sa confrérie quittent Fiesole pour se rendre au couvent de Cortone et passent par Sienne, Pérouse, Assise.
Fra Angelico s’imprègne au cours de ce voyage des œuvres de ses prédécesseurs Duccio, Giotto pour ne citer qu’eux et Masaccio son contemporain.
C’est à Cortone, autour des  années 1433/34 qu’il réalise, cette magnifique Annonciation, un chef d’œuvre d’art sacré empreint de spiritualité, de mystère et de délicatesse.


Je vous invite à découvrir, l’Annonciation de Cortone de Fra Angelico et de vous attacher aux détails de cette détrempe sur bois, riche de ses multiples références à découvrir. C’est un peintre érudit, la précision et la profondeur de son message pictural plongent dans une découverte admirative, un rébus artistique.
Autrefois, dans l’église derrière la table d’autel, se trouvait le re-table de l’Annonciation, donc derrière la table. Que voit-on ? Dans une sorte de loggia fermée de colonnades, une allusion au jardin clos, à la virginité, Marie et l’Ange Gabriel sont face à face. A côté un jardin à la végétation foisonnante rappelle le jardin d’Eden, c’est une certitude puisque l’on voit au lointain, un couple qui fuit, il s’agit d’Adam et Eve chassés du Paradis.

Détail de l'Annonciation de Cortone
Adam et Eve chassés du Paradis

Au premier plan, Gabriel, habillé d’une aube rose et motifs dorés, Marie en robe rouge et manteau bleu, un livre ouvert posé sur les genoux. Ils sont chacun sous un arc délimité par 3 piliers de la construction. 3 piliers reliés par des arcs en plein cintre, formant deux arcades.
Imaginez qu’avec votre doigt  vous partiez du bas à gauche de la première colonne, la remontant passant sur la courbe du premier arc, puis le deuxième et redescendant le long de la troisième colonne…. vous avez écrit le M de Marie ! Juste au-dessus de la colonne centrale un médaillon un visage, c’est celui d’Isaïe, il nous renvoie à la prophétie : « Voici que la jeune femme est enceinte et va enfanter un fils… »

Détail de L'Annonciation de Cortone de Fra Angelico
La prophétie d'Isaïe: "Voici  la jeune femme est enceinte et va enfanter un fils"

Dans l’analyse de l’Annonciation de Cortone de Fra Angelico, le peintre introduit des paroles écrites en lettres d’or. L’ange Gabriel énonce les paroles écrites en latin et dont voici la traduction : « L’esprit Saint descendra sur toi, et la Vertu du Très-Haut te couvrira de son ombre » Les paroles s’envolent de la bouche de l’Ange, et se lisent dans leur intégralité. Il faut observer aussi la position des mains de l’Ange Gabriel, sa main droite avec l’index pointé vers Marie, la désigne formellement, la main gauche index également pointé désigne… quoi exactement ? Le Ciel ou est-ce le doigt posé sur la bouche, un doigt qui invite à se taire, à garder le secret, à ne pas divulguer le mystère dont Marie est porteuse.
Marie, une colombe au-dessus d’elle, les mains croisées sur la poitrine en Vierge d’humilité, répond à Gabriel : « Je suis la servante du Seigneur qu’il me soit fait selon ton Verbe »… Il est difficile de lire cette phrase sur le retable parce qu’écrite à l’envers.
Tous les chrétiens connaissent cette phrase, et voilà que la révélation de la naissance christique s’inscrit dans ces quelques lettres. La partie de phrase, « qu’il me soit fait selon …»   ou « fiat mihi secundum » telle qu’elle est écrite sur la toile n’est pas lisible, les mots sont cachés derrière la colonne centrale, celle qui sépare Marie de l’Ange… Pourquoi ne sont-ils pas lisibles ? Parce que Fra Angelico pense que nous connaissons ces mots ? Ou, en religieux mystique il indique tout le mystère de la conception du Christ ?
Il faut pour aborder l’enjeu théologique, faire appel à l’analyse de  l’historien de l’art Daniel Arasse. Exégète de l’Annonciation de Cortone, il émet l’hypothèse  que la formule de Marie n’est pas visible dans son intégralité parce que écrit-il « Au moment de cette parole où s’accomplit la volonté divine et le Verbe se fait chair, la colonne se substitue aux lettres d’or, empêchant toute lecture pour faire voir une figure ». C’est la phrase exacte de DA. 
Le message prend toute sa puissance et sa profondeur, ne pouvant pas lire le « qu’il me soit fait » de la Vierge, se dessine alors le miracle de la conception du Christ, l’ombre du Seigneur.
Le mystère de l’Incarnation est le moment où la foi chrétienne répond à la question de l’Invisible !
Détail de l'Annonciation de Cortone
Gabriel: "L'esprit Saint descendra sur toi, et la Vertu du Très-Haut te couvrira de son ombre"
Marie: "Je suis la servante du Seigneur ..... ton Verbe"

Daniel Arasse prolonge sa réflexion en observant que les mots de Marie sont derrière la colonne… Cette colonne qui est aussi l’annonce de l’outrage fait au Christ, une colonne à la fois  symbole de la divinité et de l’humanité de Jésus…
Enfin, lorsqu’on observe Marie et Gabriel on constate que les personnages ne parlent pas, les paroles s’échangent bouche close. Il s’agit, sans doute,  d’une forme de Conversation sacrée, un thème pictural qui apparaît dans l’Italie du 15ième siècle. Une conversation qui se dispense de paroles, nourrie par la présence et le message de l’Esprit Saint.


Je vous invite à aller regarder cette Annonciation de Fra Angelico. A Cortone ce serait magnifique, ou plus modestement sur le moteur de recherche de votre ordinateur …
Fra Angelico est une figure majeure de la Renaissance du quattrocento. Béatifié en 1984, sa personnalité exceptionnelle est inspirée par une intense spiritualité. Il a marqué son époque par la qualité de son dessin fait de lignes sobres, avec pourtant une grande richesse décorative, des couleurs lumineuses, transparentes, harmonieuses. Sa maîtrise technique est habile, il met ses personnages en valeur par le jeu de teintes claires souligné de zones d’ombre aux tonalités froides… Son œuvre marque une évolution dans l’histoire de l’art, Fra Angelico abandonne peu à peu les -ors du style byzantin, -introduit la perspective. Son langage est simple et dépouillé, capable d’émouvoir et de parler aux âmes.
Il est le peintre des couleurs de la lumière, elles se confondent avec la lumière mystique qui inonde ses créations.
Ses compositions symboliques et compréhensibles font preuve d’une profonde intériorité. Sa peinture a traversé  et marqué l’art occidental, au même titre que les productions de Michel-Ange, Léonard de Vinci, Raphaël, ces artistes qui le suivent au siècle suivant….

Autres Annonciations peintes par Fra Angelico

Annonciation du couvent de San Marco à Florence - 1442/1443 - Fra Angelico
Annonciation de Fra Angelico - Entre 1435 et 1445 - Prado (Madrid)
Prévue à l'origine pour le couvent de Fiesole
Mais, selon Daniel Arasse, il s'agit d'une variation de Cortone, et le tableau ne peut pas être de Fra Angelico. Pour Daniel Arasse, jamais Adam et Eve chassés du paradis , ne pourraient être autorisés à venir fouler le pur jardin de Marie. 



Sites consultés: 
- L’exergue du livre de Daniel Arasse : Le détail dans la peinture

Extraits musicaux accompagnant la diffusion de l'émission, à écouter en podcast sur RCF Marne Meuse 51 - ou en direct le 2ième vendredi de chaque mois à 19h30
Mozart – Chants liturgiques
Morceau 1 – Dixit Dominus (du début jusqu’à 0’49’’)
Morceau 2 - Tu Virginum Corona (à partir de 2’49’’ jusqu’à 3’40’’)
Morceau 3 - Ave Verum – de (0’38’’ à 1’15’’)


mercredi 16 avril 2014

L'abbaye de Vauclair

L’abbaye de Vauclair

En 1822 Pingret, peintre local,  imagine l'abbaye

Sur les routes de l’Aisne, dans le triangle Reims, Soissons et Laon, se trouve le terrible Chemin des Dames… Pourtant au-delà de ce lieu de mémoire, il y a une découverte magique à faire, une oasis de paix et de lumière, c’est l’abbaye de Vauclair… L’empreinte de ce lieu permet de reprendre pied, de souffler intérieurement après avoir visité la Caverne du Dragon, compris, imaginé la rage, la haine, la souffrance des hommes, presque entendu le bruit du canon, les hurlements de peur des soldats et des chevaux….

Je vous invite à imaginer cette abbaye de Vauclair, à la faire revivre par le don de votre inspiration, celui de la rêverie et de la poésie…
Nous sommes en 1134 et Bernard de Fontaine ou de Clairvaux, bâtit une abbaye cistercienne au creux d’un vallon caché dans la forêt de Bouconville, là où coule une rivièrette appelée l’Ailette…  C’est peut-être ainsi qu’Arthur Rimbaud l’a décrite :

« C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons. »

L'abbaye deVauclair

Vauclair, fille de Clairvaux…  
Les vestiges d’aujourd’hui enchantent encore l’imaginaire. En déambulant silencieusement, les traces laissées par le temps, font revivre un monde disparu et qui pourtant, recomposent l’espace  …
Il ne reste rien, hormis quelques pierres blanches et grises, des murs déchiquetés, des piliers brisés, quelques arcades cintrées sur lesquels pousse une mousse épaisse.

Il faut imaginer une église en croix latine rythmée de trois travées, un chevet plat et sobre, un chœur étroit pour accueillir des matines jusqu’aux complies, les moines de l’Ordre, …Le porche du narthex, à la voûte arrondie, encadré de fenêtres géminées en plein cintre conduit les frères convers à l’intérieur du lieu.
Issu de l’Ordre de Saint Benoît, celui de Saint Bernard, dans son idéal de dépouillement ne s’autorise pas au débordement décoratif. Les vitraux incolores, sans images faits de simples motifs d’entrelacs ou de fleurs dispensent la lumière. Les chapiteaux qui reçoivent la poussée des voûtes d’arêtes sont dépouillés. Chapiteaux simplement sculptés de feuilles d’eau, pour rappeler sans doute et pourquoi pas, Cîteaux : le cistel autre nom du roseau…
Un art de rigueur, pour un retour au désert, à la réflexion et puisque l’homme est un roseau pensant, nourrir et éclairer sa pensée par la méditation, la prière, l’offrande, rendre présent l’Invisible.


La promenade laisse encore deviner les traces de la vie des frères convers, car l’abbaye est une petite ville. Il faut des hommes de bonne volonté pour veiller au bien-être de tous, et la nourriture spirituelle ne délivre pas des contingences du quotidien..
Là-bas, voyez un pigeonnier, inventez une hôstellerie, un réfectoire, un potager, des bâtisses pour les outils. Toute une vie paysanne œuvre et chacun occupe sa place dans le rythme des jours et des saisons.
L’abbaye de Vauclair possède des terres à blé, à vignes, un pressoir, un four pour fabriquer tuiles et poteries, …
Le chardon de Marie

Arrêtons-nous, au jardin des simples… A l’abri des grands arbres poussent dans de petits carrés formant un damier, le cerfeuil, la menthe, la sauge, l’absinthe, la camomille, le pavot, le chardon de Marie. On utilise avec art, le rhizome, la feuille, le bulbe, le bourgeon, la tige, le pétale ou la graine pour soulager les maux et les douleurs… Le chardon de Marie, aux multiples vertus thérapeutiques,  est tacheté de blanc.  Pourquoi ? Une jolie légende : Alors que Marie allaitait l’Enfant Jésus, elle l’a caché sous la plante épineuse à l’arrivée des soldats d’Hérode. Quelques gouttes de lait sont tombées de son sein sur les feuilles, les marquant à jamais de sa présence…

Un jardin de simples


Et pourquoi, encore au milieu du damier, un carré nu avec une simple pierre de pays ? Son rôle est d’emmagasiner la chaleur du jour pour la redistribuer la nuit, protégeant les plantes fragiles du froid nocturne.
Plus loin le verger entretenu avec soin, laisse pousser nèfles, noisettes, pommes, poires, et raisin.









C’est une promenade que je vous propose, alternée de rêverie ou de réalités historiques…
Que reste-t-il de la salle du chapitre, du cloître, de la fontaine, du scriptorium ?
Des ruines, des souvenirs, une présence …



«  Dans ce petit trou de verdure où chante une rivière » on peut encore imaginer les moines copistes, debout face à leur lutrin, copiant inlassablement les Ecritures pour diffuser la Parole, le savoir, la réflexion… Parfois, ils vont dégourdir leurs doigts endoloris et durcis par le froid au feu du chauffoir et retournent inlassablement à la tache, pour la mission dont ils sont chargés. Illustrer, copier, recopier, le psautier, le bréviaire, l’évangéliaire, les livres des petites, des belles, des riches Heures, les enluminant de décors fleuronnés. En quelques traits ils rendent l’expressivité et l’élégance d’un art dans un raffinement sobre de couleurs et de lignes souples. 

Et puis, il faut répondre à l’appel de la cloche, se rendre dans la salle capitulaire appelée encore salle du chapitre… Cet espace est le centre de la vie des moines, il possède un rôle d’enseignement, de décision, et de rappel à la discipline monastique. Les moines assis face à face sur de durs bancs de bois, le long des murs de la pièce, écoutent l’abbé debout sur l’estrade.

Juste de l’autre côté de cette salle, une sortie mène au cloître…
Il faut encore recréer l’image d’une cour carrée, cloître issu de la villa romaine,  un déambulatoire de terre battue ou peut-être recouvert de carreaux de terre rouge mal équarris. Des arcades arrondies soutenues par de doubles piliers éclairent les moines qui prient. Le regard limité par la construction, ne peut que s’élever pour retrouver le guide de sa pensée. Au centre du jardin, chante une fontaine… Elle symbolise la Fontaine de Vie, inventez-là, avec en son sommet une Vierge à l’enfant. Il tient une pomme dans sa  main.


Ainsi à quelques pas, du Chemin des Dames, il est possible de découvrir, le souvenir de cette abbaye. La paix de l’endroit a effacé les drames, les larmes et les désespoirs. Et pourtant nous ne pouvons oublier les derniers vers du Dormeur du Val de Rimbaud, qui semblent avoir été écrits pour ce lieu :

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit
.


Décombres de l'abbaye de Vauclair en Juillet 1920.


Le message de Saint-Bernard, apporte la paix et l’Espérance… Vous l’associerez au centenaire de cette guerre fratricide de 1914/1918.
Qui a voulu que les deux sites soient imbriqués l’un dans l’autre ?
Vauclair, offensée par la guerre de Cent ans, vendue à la Révolution de 1789, pilonnée dans les bombardements de 1917, puis oubliée.





Un jésuite a redonné vie à ce lieu de prière dans les années 1970…
Avec courage, il a sorti la construction des ronces, et des débris pour lui redonner son âme, guidé et conduit par Celui qui n’a jamais quitté les lieux.





Aujourd’hui des familles viennent s’y promener, les solitaires y méditer, les enfants y jouer, les croyants et les religieux y prier, chacun marquant l’endroit de son interprétation, de sa personnalité et de son émotion.





Charles Péguy a écrit
« De l’âme de la veille on peut faire l’âme du jour. Mais celui qui n’a point de veille, comment lui ferait-on un lendemain ? »


Pour écrire ce texte, j’ai consulté des articles sur Internet, lu le livret « L’Ordre Cistercien » de Michel Niaussat aux Editions Ouest France.

A tous, je souhaite de belles fêtes de Pâques.
Que chacun vive dans son cœur et sa foi, une Espérance renouvelée.







jeudi 20 mars 2014

Le printemps est arrivé

Le printemps est arrivé
Le printemps est arrivé par surprise dans les jardins, jaillissant de soleil illuminant et réchauffant autour de nous la nature et les êtres.
Quelle surprise, depuis plus de trois mois nous allions de tempêtes en inondations ou pluies incessantes… et là, sans crier gare, le voilà ce renouveau attendu qui nous surprend, nous ravit, nous étonne…
Alors, jetons les manteaux dans les placards et profitons de ces premiers soleils, de la lumière vive, de son éclat intense. Le ciel a tout oublié des grisailles et nous voilà déjà à la recherche de nos protections solaires, lunettes, crèmes ou chapeaux… Un changement si rapide, que nous en sommes tout déconcertés, mais craintifs à l’idée que la météo veuille relire son calendrier…
Le soleil s’est introduit en ami dans les maisons, les chemins, les couleurs ravissent les yeux, les odeurs oubliées resurgissent, s’exhalent, les pépiements joyeux entrent par les fenêtres  grandes ouvertes.
Tout est promesse…
Le changement rapide du climat, ne nous a pas laissé observer les premiers frémissements du réveil de la nature. Il y a quelques jours encore, le perce-neige blanc de courage affrontait, la rigueur du vent et des bourrasques, il balançait sa coiffe fleurie au rythme des souffles venteux accompagné de ses tiges vert-cru, ressemblant à de longs cheveux balayés et secoués par les rafales haineuses du vent de l’hiver...
Et puis voilà, la fraîcheur a fait place à la rigueur et la douceur estompe déjà la fraîcheur…
La fleur de neige s’est effacée au profit de la violette, elle la toute petite messagère de renaissance… Dans les chemins encore humides, on l’aperçoit, timide, cachée, discrète… Il faut la découvrir, elle se s’affiche pas, il faut la chercher, la trouver …

En la cueillant au milieu du talus herbeux, cachée entre le trèfle et le chardon, on est un peu déçu de n’avoir pas humé son odorant souvenir, qui aurait tant rappelé l’enfance… Comme une madeleine « à la Proust »  il aurait été agréable de retrouver l’émanation verte, fleurie, tenace et fragile de cette fleur… Des crocus panachés de bleu - violet, de jaunes dorés et de blancs aux lignes safranées éclairent les pelouses, ou le pied des arbres. Quelques primevères sauvages aux couleurs tendres parsèment les sentiers. Ses teintes de blanc crème au couleur de beurre lancent un coucou aux promeneurs, aux animaux qui eux aussi s’ébattent avec délice dans la douceur revenue.

Regardez ce chaton qui bondit après une mouche, une première abeille, s’étonne de ne pas la retrouver, assis interrogatif le derrière effrontément posé au milieu des touffes d’herbes et des premiers bulbes naissants. Et, tout à coup, rattrapé par son atavisme, se dirige ventre au sol, silencieux et souple comme un jeune sioux, pour tenter de saisir le merle qui sautille dans l’herbe… l’oiseau s’envole leste et vif, lance une trille moqueuse au jeune fauve qui s’essaie ! Plus loin, des chiens se roulent, s’ébrouent, se poursuivent avec l’air de sourire, de se réjouir du joli moment à savourer…

Les enfants ont retrouvé le toboggan de leurs délices, le petit train à conduire dans un coin du jardin public, la balançoire et les concours de hauteur, le vélo pour faire courir parents et grands-parents, puis enfin se mesurer aux concours de vitesse entre copains !… Quelques jeunes femmes aux ventres arrondis portent elles aussi l’espérance de la vie.
Les jardiniers affutent leurs outils, premiers greffages, semailles, repiquages. Tailler le tamaris, le sureau, et l’althéa. Éclaircir quelques pousses, préparer les grillages, les treillages, les rambardes des balcons ou des pergolas…
Le printemps est fête pour chacun de nous tous, et célèbre le bonheur retrouvé, la lumière, la nouveauté attendue.
Les arbres aux petites fleurs de rose ou de lait se détachent dans un ciel lumineux. Les bourgeons collants explosent et laissent apparaître la feuille repliée. Le beau temps s’annonce par des éclats de couleur, des chants d’oiseaux, des cris d’enfants. Même les nuages sont de la partie, ils s’effilochent en longues bandes bleues, aux accords de marine, de violine, se gonflent de coton et jouent avec les reflets du soleil… nous éblouissant, nous réchauffant, ou nous obligeant à remettre une laine sur nos épaules frissonnantes, juste pour nous dire « non , ce n’est pas encore l’été..  pas si vite.. Prenons le temps de vivre jour après jour les promesses de la saison ! »
Pourtant, la fraîcheur de l’air fait place à une douceur qui s’affirme certains après-midis par
un soleil presque trop fort, trop ardent…
La jonquille fuit déjà… les iris trempent leurs pieds dans l’eau du ruisseau, la tête dodelinant mollement au vent encore vif !
Il ne faut pas que le printemps laisse sa place trop vite à cet été qui peut-être va nous brûler.
Il faut encore, s’émerveiller de l’éclosion de cette nature qui nous ravit, nous sort de ce long hiver triste, gris, terne et pluvieux.
Toutes les couleurs reviennent, nous éclairent, réchauffent le corps, le regard, le cœur.
Battons des mains en silence, réjouissons-nous dans un alléluia secret.
Forsythia d’or, prunus aux éclats roses, premières feuilles vert-tendre, aubépine de crème laiteuse… Foisonnement pour la palette du peintre. Dans le jardin, encore, persistent les boules ocre-roux des hortensias de l’année dernière… Surtout ne pas y toucher ! Attendre, les premières pousses vertes pour les couper et ensuite laisser la luxuriante rondeur couleur de matin pâle, de tuile ou d’ardoise s’épanouir dans l’ombre fraîche.
Deviner, déjà, les promesses des roses - violacés de la glycine à la clématite…
S’accroupir dans les allées du jardin, et s’émerveiller de l’apparition en une nuit des tulipes, petites pyramides multicolores!
Et, le seringa blanc, celui caché derrière le mur de la vieille école, je sais déjà son odeur entêtante, présente et puissante… Sans le voir, deviner quand il est fleuri en passant à l’ombre du muret, ses fragrances se diffusent en une harmonie verte, fraîche, vivifiante…
Le printemps revenu nous enthousiasme après ce long hiver difficile, nous enivre de ses subtils effluves. Ils deviennent parfois serments, espérances, déclarations par ce renouveau célébré par la nature.

Cette saison sans Botticelli, sans Vivaldi ne serait pas aussi belle sans leurs accords de couleurs, de sonorités qui célèbrent aussi les retrouvailles attendues…
Le printemps de Botticelli, une scène de mariage entre les deux personnages habillés de rouge : Hermès et Vénus aux allures de madone, et puis Flore, les trois Grâces, Zéphir, Cupidon parés pour l’évènement.  La souplesse, l’élégance des lignes, les drapés confirment l’importance du moment. Tout est gage d’avenir, de douceur de vivre:  la saison revenue sous les frondaisons verdoyantes, les fleurs, les oranges , pommes d’or du jardin des Hespérides qui confirment le cycle éternel de la fécondité, de l’immortalité …
A cela répond, un siècle et demi plus tard, le tempo rapide de la primavera de Vivaldi…
Le texte  dit:
Voici le Printemps, Que les oiseaux saluent d'un chant joyeux. Et les fontaines, au souffle des zéphyrs, Jaillissent en un doux murmure.
Aux sons joyeux de la musette, nymphes et bergers dansent pour fêter la splendeur du printemps »…