Un texte écrit après la lecture du
livre de Florent Quellier « Gourmandise, histoire d’un péché
capital » aux éditions Armand Colin
Et si aujourd’hui on parlait d’un
pays ? Le pays de Cocagne
C’est une contrée imaginaire une utopie qui prend naissance
dans tous les pays d’Europe dès le 13ième siècle et évolue dans sa
représentation jusqu’au 17ième.
Cet idéal utopique est lié aux duretés de l’époque avec ses privations,
ses guerres, ses famines… Rêver d’une contrée dans laquelle on ne se priverait
plus, où finalement le serf et le paysan vivraient à l’égal des maîtres !
Ce concept naît dès le 13ième siècle, il se
véhicule par les fabliaux, les poèmes, les farces, les gravures. Quelques pays
d’Europe comme l’Italie et l’Angleterre ont exactement le même adage que
celui de France « En pays de Cocagne, plus tu dors plus tu
gagnes ! »
Ce serait une confusion que d’unir pays de Cocagne et
Paradis terrestre. La référence biblique du paradis dans la Genèse parle d’un
lieu où « des herbes portant semence
et des arbres fruitiers donnant sur terre selon leur espèce des fruits
contenant leur semence. » Hors le Pays de Cocagne peut avoir un arbre
qui donne en même temps : chapons, confitures, pains, habits... Et puis, dans
le Paradis d’Adam et Eve, il n’y a que des herbes, des fruits et des racines,
la viande en semble exclue ainsi que le vin, puisque c’est Noé qui a élevé
la première vigne.
Le pays de Cocagne se situe « quelque part à
l’Ouest » pour l’imaginaire allemand il est à « 3 lieues au-delà de
Noël » pour Boccace dans le Décaméron « à millante milles de
Florence », alors que le paradis que l’on croit sur Terre au Moyen-âge se
trouve à l’est de Jérusalem. En1592 quand Christophe Colomb découvrant l’île
d’Hispaniola, c'est-à-dire Haïti et à l’ouest des terres connues, il la décrit aux Rois Catholiques comme le pays
de Cocagne.
Le pays de Cocagne - Remondini - 1660 - Musée de Bassano del Grappa |
Quelles références
picturales pour ce pays de Cocagne ? Il pourrait y avoir « La nef des fous » de
Jérôme Bosch, au Louvre qu’on ne peut voir actuellement, les gravures de Bertarelli
ou Remondini en Italie, mais aussi « Le pays de Cocagne » de Peter
Brueghel peinte en 1567, exposée à l’Alte Pinacotek de Munich. Je reprendrai
pour le décrire un extrait du livre passionnant de Florent Quellier « Repus, débraillés et grassouillets,
trois gourmands dorment du sommeil du juste à l’ombre d’un arbre protecteur. Un
quatrième attend sous un auvent couvert de tartes. Des chapelets de saucisses
dressent un plessis (c’est une barrière) ; un œuf à la coque avance en
dodelinant pour être dégusté, un cochon rôti offre côtelettes et jambon à qui
veut bien se servir. Les arbres même sont comestibles »…
Le pays de Cocagne - Brueghel l'ancien - 1567 - Pinacothek de Munich |
La signification de ce mythe se rattache de nos jours à
l’idée d’un divertissement populaire, mais au 13ième siècle, il est
à envisager comme une inversion des conséquences du péché originel de
gourmandise… De là à penser qu’il s’agit d’une charge contestataire contre
l’église, ses interdits alimentaires, ses périodes de carême et de jeûne, c’est
la supposition émise par Florent Quellier auteur du livre « La
gourmandise, histoire d’un péché originel ».
A bientôt…
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