Aujourd’hui je vous emmène à Bourges…
La grand'maison de Jacques Cœur à Bourges |
Ce n’est de l’homme dont je veux vous parler mais de sa « grand’maison »,
comme il l’avait appelée. L’élégance de son architecture, la richesse et la variété de ses décorations
fait de cet édifice une des premières et des plus somptueuses
constructions d’architecture civile de
ce milieu du 15°. Elle met en scène le statut social de son commanditaire, et
offre une vision cohérente de sa conception ornementale parce que construite en
peu de temps, de 1443 à 1451. Une maîtrise d’œuvre effectuée par des hommes qui ont travaillé à l’édification du
palais de Jean de Berry avec -Colin le Picard- « maître des œuvres du
roi » résidant à Bourges, et les charpentes en chênes, en forme de carène
de bateau inversée ont été exécutées par Jean de Blois.
L’immense et longue façade de la maison de Jacques Cœur est
conçue d’un haut pavillon d’entrée avec une poterne, une porte charretière,
au-dessus un dais avec autrefois la statue équestre de Charles VII. Le dais est
surmonté d’une fenêtre ogivale à quatre
lancettes et d’un remplage de pierre dessinant une fleur de lys, ouverture
derrière laquelle se situe la chapelle. De chaque côté de ce pavillon d’entrée,
deux ailes avec un rez-de-chaussée presque
aveugle, un étage éclairé de fenêtres à meneaux disent aux visiteurs que c’est un
palais à la croisée des styles gothique et renaissance. Sous chaque fenêtre, et
à la corniche du toit court une frise de pierre, ornés de trèfles au milieu desquels
alterne un cœur, une coquille…
Une coquille pour la mémoire de St Jacques, un cœur au nom
battant comme était l’homme de ce lieu.
Le décor de cette façade foisonne de sculptures et
d’ornementation, tourelle d’escalier, ciselures, rinceaux ouvragés, arcs en
accolades aux crochets feuillus… Il faut longer la construction, observer aux
intersections des larmiers et des colonnettes des petites têtes sculptées,
enfant, femme, clercs, laïcs, et même un africain et un asiatique …
D’où vient cette connaissance ? Jacques Cœur était un voyageur, il connaissait l’Orient, ses échanges commerciaux lui avait fait approcher à Alexandrie les hommes du Soudan pour les cotons et l’or, les hommes d’Orient pour les soieries et les épices.
Avant d’entrer, jetons un regard vers ce dais aujourd’hui vide, au milieu duquel caracolait Charles VII. De chaque côté deux fausses fenêtres où s’accoudent les bustes sculptés d’un homme et d’une femme regardant au loin, quand on dit qu’à l’origine ils étaient tous deux inversés et tournés vers la statue du roi en signe d’allégeance et de respect. Il s’agit sans doute de Jacques Cœur et de son épouse Macée de Léodepart.
D’où vient cette connaissance ? Jacques Cœur était un voyageur, il connaissait l’Orient, ses échanges commerciaux lui avait fait approcher à Alexandrie les hommes du Soudan pour les cotons et l’or, les hommes d’Orient pour les soieries et les épices.
Avant d’entrer, jetons un regard vers ce dais aujourd’hui vide, au milieu duquel caracolait Charles VII. De chaque côté deux fausses fenêtres où s’accoudent les bustes sculptés d’un homme et d’une femme regardant au loin, quand on dit qu’à l’origine ils étaient tous deux inversés et tournés vers la statue du roi en signe d’allégeance et de respect. Il s’agit sans doute de Jacques Cœur et de son épouse Macée de Léodepart.
Jacques Cœur et Macée de Léodepart |
Entrons dans la cour de la grand’maison berruyère de Jacques
Cœur … C’est un bel espace intérieur
fait d’un corps d’habitation ponctué de trois tourelles d’escalier. La tour
centrale est d’une conception totalement novatrice pour l’époque, elle sépare les
appartements privés des lieux de réception, ouverture aux autres en même temps que
préservation de l’intimité.
La pierre de Charly extraite des carrières de Saint-Ursin et
Saint-Florent ont la tendreté et la dureté nécessaires pour y sculpter les
décors des hauts des portes de forme ogivale qui ceinturent la construction. Voyez
cette représentation d’une femme qui fait la vaisselle et de deux hommes
affairés aux travaux de cuisine, c’est bien là, l’entrée des communs… Observez
encore l’escalier aux trois tympans menant à la chapelle, sur un des côtés un
enfant de chœur sonne l’heure de la messe, quand à son opposé 4 personnages
semblent en marche vers le tympan central qui lui représente l’intérieur d’une
église où l’on voit gravé sur l’autel, le cœur et la coquille.
Toute une symbolique facile à interpréter quand, en ce temps-là, beaucoup ne savent pas lire.
Les impostes sculptées au-dessus des portes de l’ouverture
centrale, sont plus ésotériques, elles disent la connaissance, le
savoir, les références lointaines du maître de logis…
Le tympan aux trois arbres : un acacia, un oranger, un
palmier-dattier… et puis encore des plantes identifiées, l’une aux tiges oblongues
et fleurs à cinq pétales : c’est la fleur textile du lin. Et puis une
plante aux feuilles fines et fleurs en grappes c’est la guède celle dont on
obtient le pastel. Quant à la dernière, située à droite du palmier il s’agit de
la garance…Toutes ces représentations viennent du lointain Orient, du Nil ou
des proches Flandres. Des arbres, des plantes,
des fleurs qui font la fortune de ce commerçant, témoignage d’un jardin qui a bâti sa richesse…
Mais regardez encore, de chaque côté du pied de la fleur de
lin… Deux plumes ! Curieux, n’est-ce pas ? Pourquoi ?
Les trois arbres, les plantes, les plumes du tympan Entrée d'honneur dans la cour intérieure du palais |
Jacques Cœur est immensément riche, il possède des bateaux,
des comptoirs dans toute la Méditerranée, il a des hommes de confiance implantés
partout. Comment passer des ordres dans une époque où les communications sont
difficiles, dangereuses et lentes ? La réponse se trouve, sans doute, dans l’utilisation de pigeons voyageurs… Au
Royaume de France, on ne connaît pas la science colombophile, mais Jacques Cœur
lui en a connaissance. En 1432 il est allé à Damas, et cette ville est réputée
pour la maîtrise de cet art !
L’intérieur de la grand-maison de Jacques Cœur à Bourges a
malheureusement était transformée voire dénaturée au fil du temps, parce que utilisé en tribunal puis hôtel de
ville. Elle garde encore les marques de sa prestigieuse et novatrice
conception, par la volonté créatrice de cet homme qui a connu le raffinement de
l’Orient… Il reste la petite étuve qui permettait les soins de la toilette, on
chauffait le sol, on jetait de l’eau froide sur les pierres chaudes, de la
vapeur s’en dégageait, c’était le hammam avant l’heure. Les couloirs de
circulation à l’intérieur de la maison
sont invisibles aux invités, mais ils permettent le service, et le déplacement en
toute discrétion, entre les 43 pièces de ce palais,! La salle d’apparat ou des
festins avec le balcon des musiciens, l’immense cheminée aux ouvertures prévues
pour redistribuer la chaleur.
Chaque pièce est dotée d’un ou deux foyers. Même
l’exposition des fenêtres a été réfléchie, utiliser autant que possible la
lumière et la chaleur du soleil. Tout cela personne ne l’avait jamais conçu
dans une demeure privée !
La salle des Festins et la grande cheminée |
Allons dans la salle des galées…
Cette pièce était à
l’origine couverte de vitraux de galées, ou navires marchands, elle constituait
la transition avec les espaces publics et privés. Il ne reste rien de son
ameublement, seul subsiste un bas-relief représentant avec justesse le monde
marin quant à cette époque la mer est encore, pour la plupart, un lieu
fantasmagorique celui des monstres et de l’imaginaire.
Le vitrail des galées |
Du Capitole à la roche tarpéienne, il n’y a jamais bien loin. Charles VII finit par prendre
ombrage d’une trop grande fortune et la rivalité haineuse des nobles à qui
Jacques Cœur a tant prêté d’argent causent sa chute. Il est accusé de
malversations et même d’assassinat : « Convaincu du crime de lèse
majesté pour atteinte à l'honneur du Roi, de concussion et d’exactions »,
il est passé au supplice de la question, ses biens sont confisqués, il est
emprisonné.
Enfermé à la prison de Poitiers, il réussit à s’enfuir, et
trouve refuge auprès du pape Nicolas V puis Calixte III. Il reprend force et
courage, part en Croisade, il meurt sur l’île de Chio, sans qu’on en sache
vraiment les causes.
Pour compléter l’extraordinaire odyssée de cet homme, je
vous invite, à faire un détour par Bourges lors de vos déplacements, à lire ou
à relire le livre « le Grand Cœur ». Je terminerai par la lecture de
quelques phrases de ce roman, dans lequel JF Rufin imagine une méditation de
Jacques Cœur:
« Ce palais était une offrande, que je faisais aux
temps futurs, non pas dans l’espoir vain qu’ils se souviendraient de moi, mais
pour porter témoignage de la force et du rêve. […] ceux qui continueront de le
voir quand j’aurai disparu sauront quelle peut être la force de l’esprit et
prendront, je l’espère, leurs chimères au sérieux. Toutes les choses existent
en dehors de nous. […] Seul nous appartient ce qui n’existe pas et que nous
avons le pouvoir de faire venir au monde »
Sites à consulter
- Le palais Jacques-Cœur collection Itinéraires – Editions du
Patrimoine
- http://www.jacques-coeur-bourges.com/visitepalais1.html
- http://www.jacques-coeur-bourges.com/visitepalais1.html
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