La collection Paul Guillaume au musée de l'Orangerie à Paris
Devenu musée en 1920 pour accueillir les Nymphéas que Monet
vient d’offrir à l’état, il est aménagé en 1965 en partie basse pour loger la
collection Walter et Guillaume.
La maison Bernot - Utrillo - 1924 - Musée de l'Orangerie |
La collection privée de Paul Guillaume est une des plus
belles du début du 20ième siècle… Cézanne, Derain, Gauguin, Marie
Laurencin, Matisse, Modigliani, Picasso, Renoir, Soutine, Le Douanier Rousseau,
Utrillo… Ils sont tous là, dans une fête de la couleur, les concepteurs de
l’art moderne, les avant-gardistes de ce siècle naissant.
Paul Guillaume et Modigliani à Nice en 1917 |
Qui était Paul Guillaume ? Un homme d’origine modeste, qui un jour dans le garage où il est employé, expose des sculptures africaines. Apollinaire le précurseur du surréalisme remarque cet homme, lui ouvre les portes du Bateau-Lavoir, de Montmartre.
Là, le jeune homme rencontre quelques barbouilleurs inconnus et pauvres: Picabia, Picasso, Chirico, Modigliani, Soutine… Ce garçon intelligent a du flair, un don extraordinaire pour débusquer les artistes. Il ouvre une petite galerie, Rue de Miromesnil et expose les toiles qu’on lui confie… il achète, vend, et peu à peu prend sa place sur le marché de l’art, est reconnu comme un visionnaire, un découvreur de talents…
Et voilà qu’il rencontre une femme, Juliette Lacaze. Elle
vient de son Aveyron natal… Que fait-elle ? Employée dans une boutique où
elle vend des gants, modèle pour peintre au bateau-lavoir, vestiaire dans une
boîte de nuit ?… elle est un peu tout ça… mais surtout elle est belle,
très très belle… mystérieuse, ensorceleuse, séductrice et séduisante…
En 1920, Paul Guillaume, le marchant d’art épouse cette
femme, Juliette Lacaze dont il est très amoureux. Et l’ascension sociale
continue.. Elle, qui n’a aucune formation s’intéresse à l’art, pressent sous la
houlette de son mari, les talents…
Ils ouvrent une galerie, rue de la Boétie, s’installent dans
un magnifique appartement, de 650m2 rue du bois à Paris, aujourd’hui Avenue Foch…
Paul Guillaume crée un journal «Les Arts à Paris », s’ouvre à la clientèle internationale, devient conseiller et fournisseur d’Alfred Barnes le richissime américain… Ils continuent à s’enrichir, Paul Guillaume voyage avec Juliette son épouse.
Le bureau de Paul Guillaume - Photo de maquette prise au musée de l'Orangerie |
Paul Guillaume crée un journal «Les Arts à Paris », s’ouvre à la clientèle internationale, devient conseiller et fournisseur d’Alfred Barnes le richissime américain… Ils continuent à s’enrichir, Paul Guillaume voyage avec Juliette son épouse.
Juliette ?, non c’est trop simple, elle s’appelle
désormais Domenica !
Domenica se rend aux Etats-Unis les malles pleines de
vêtements des plus grands couturiers. Un jour, sur le bateau du retour, elle
fait connaissance d’un riche architecte, Jean Walter…
Alors, ils vivront à trois sous le même toit !!
Derain a fait le tableau de cette femme : -vénéneuse !
Derain a fait le tableau de cette femme : -vénéneuse !
Il rend la beauté, la classe, la distinction naturelle de
cette ensorceleuse… La toile « Mme Guillaume » nous montre un visage
aux traits fins, de mystérieux yeux verts qui semblent rêver, une bouche
scellée sur ses appétits, ses secrets. Elle porte un magnifique chapeau qui
laisse deviner des cheveux sombres qu’elle porte courts, une robe de soie crème
l’habille dans une superbe et sobre élégance.
Portrait de Mme Guillaume - Derain- 1929 Musée de l'Orangerie |
Quel hommage pour Derain ! Lui le peintre fauve a
brossé sa toile dans des tons d’ocre et de beige et l’harmonie colorée rend
avec éclat la mondanité du personnage…
Un jour de 1934, Paul Guillaume fait une crise
d’appendicite. Domenica, ne veut pas
qu’on hospitalise son mari, elle va le soigner, avec son pendule, et la force
de son regard d’émeraude sans doute. On transporte enfin Paul Guillaume à
l’hôpital, l’infection s’est généralisée, il fait une septicémie… il meurt …
Certains s’interrogent sur le retard pris pour soigner cet
homme.
De son vivant, Paul Guillaume avait fait part de son
intention de donner sa collection à l’état. Mais Domenica est légataire
universelle et elle a la capacité de vendre ce qu’elle veut pour subvenir à ses
besoins, et pour hériter totalement il faut un enfant…
Mais, Mme Veuve Guillaume est enceinte… enfin, son ventre
prend du volume, et puis elle disparaît et revient avec un enfant.
On saura plus tard que cet enfant a été adopté. Il est déclaré comme l’enfant de feu Paul et
Domenica Guillaume… Paul Guillaume a un héritier, la collection n’appartiendra
pas à l’état !
Domenica épouse Jean Walter, son amant, qui en plus d’être
architecte possède des mines d’argent au Maroc.
L’appétit de Mme Walter, ne se dément pas, elle vend des
Picasso « cubistes » achète à prix d’or d’autres toiles. Ainsi en
1952, elle achète un Cézanne « Biscuits et pommes » pour 33 millions
de francs l’enlevant à l’armateur Niarchos qui aurait aimé l’acheter.
Biscuits et pommes - Cézanne- 1879 -Musée de l'Orangerie |
Elle continue à émailler sa vie de rencontres masculines,
dont un médecin, un certain docteur Lacour…
Mariée depuis une quinzaine d’années avec son second mari,
Jean Walter, un midi de 1957, elle déjeune avec lui au restaurant. Il sort pour
aller à la voiture, traverse, et là, il est renversé par un véhicule. Non, elle
ne veut pas qu’on appelle une ambulance. Elle fait charger son mari dans sa
voiture, elle arrive à l’hôpital… son mari vient de mourir…
Elle est veuve pour la seconde fois ! Et à la tête
d’une fortune considérable.
Domenica Guillaume Walter a toujours un fils, et un amant, ce jeune médecin Lacour.
Ce fils a grandi, c’est un
homme maintenant…
Elle ne s’en est jamais occupée. Alors qu’il était encore
enfant, cruellement elle lui a asséné, qu’il était un enfant adopté.
Il s’appelle Jean-Pierre. Un jour il est abordé dans la rue
par un militaire…
Cet homme lui dit : « j’ai un contrat sur
votre tête».
Mais ce militaire ne veut pas tuer, et les deux hommes
mettent au point un stratagème pour punir le coupable. Le militaire dit au
donneur d’ordres qu’il a rempli son contrat, touche l’argent et se rend à la
police pour dénoncer les faits…
Qui est le commanditaire ?
Un médecin appelé Lacour…
Mais n’est-ce pas lui, l’amant de Mme Walter- Guillaume,
veuve de ces deux personnes nommées ? -Bien sûr que si !!!
Alors, il y a jugement mais il n’y a pas eu crime, et Lacour
sort de prison.
Chacun retourne à sa vie.
Jean-Pierre Guillaume fait la connaissance d’une femme, elle
est coiffeuse.
C’est en fait une call-girl. Après quelque temps de leur
histoire, cette dernière se rend à la police pour accuser Jean-Pierre Guillaume
d’être son souteneur…
Mais pourquoi, cela ?
- A l’époque une condamnation pour proxénétisme vous prive
de votre héritage.
Au regard d’un tel passif tout ce qui touche Mme Guillaume
ou Mme Walter est assez sulfureux ! Le juge a des doutes, interroge, fait
faire une enquête.
La demoiselle avoue : Elle a été payée pour séduire
puis dénoncer le pauvre Jean-Pierre Guillaume !
Par qui a –t- elle été payée ?
Mais non… pas par Juliette Lacaze devenue Domenica veuve de
Paul Guillaume et Jean Walter ... mais par un certain Lacaze frère de la dame
qui occupe notre récit, qui hélas est
une histoire vraie !
Cette fois, pour raisons de santé, Lacaze sort aussi de
prison.
Extraordinaire, curieux, surprenant, inexplicable et
pourtant vrai !!!
Que se passe-t-il ensuite ? Quelles sont les
tractations faites pour que Mme
Guillaume ou Walter évite la prison, car manifestement, elle n’est pas toute
blanche dans l’affaire ?
On ne le sait pas… toujours est-il, que le ministère de la
Culture conduit par le ministre de l’époque André Malraux a obtenu pour l’état
français, la cession de la collection de
Paul Guillaume, pour une valeur qui aujourd’hui se mesurerait à quelques
millions d’euros.
Mme Walter finira ses jours tranquille, richissime, entourée
de ses tableaux qui ont, ne pouvons-nous pas le penser le prix du sang….
Elle mourra en 1977…
Pour vous raconter cette histoire j’ai lu de nombreux
articles que je vous invite à retrouver sur internet dont l’un écrit par le
journal libération, et qui a servi de trame à mon récit...
- Rendez-vous au musée de l’Orangerie pour avoir un aperçu de
cette magnifique collection Walter Guillaume.
- Voyez le documentaire, Domenica ou la diabolique de l'art, écrit et réalisé par Yvon Gérault et Jérémie Cuvillier, produit par Per Diem films, diffusé en 2010 sur France 5 est disponible en DVD
- Réjouissez-vous de penser que c’était le désir premier de
Paul Guillaume d’ouvrir un hôtel musée pour partager la beauté afin que chacun
s’émeuve, comprenne et s’initie à l’art de son temps…
- Voyez le documentaire, Domenica ou la diabolique de l'art, écrit et réalisé par Yvon Gérault et Jérémie Cuvillier, produit par Per Diem films, diffusé en 2010 sur France 5 est disponible en DVD
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