Bonjour à tous…
Aujourd’hui, je vous invite à vous rendre au musée Jacquemart-André à Paris pour découvrir :
« Florence, Portraits à la cour des Médicis »
L’exposition, commencée depuis septembre se clôturera le 25 Janvier 2016.
Elle présente un panorama des œuvres réalisées par les peintres du 16ième siècle dont Pontormo, Bronzino, Salviati, Vasari pour ne citer qu’eux.
Détail de l'oeuvre "Jeune femme au recueil de Pétrarque" (sonnet 68) Andrea Del Sarto - 1528 - Galerie des Offices - Florence |
Des réalisations qui permettent d’appréhender l’évolution du portrait, comprendre l’apogée de cette brillante période florentine.
Je vous propose une visite à imaginer, vous invite à aller la compléter par un tête à tête personnel et approfondir le sujet effleuré pour vous.
Depuis Cosme l’Ancien à Laurent le Magnifique, celui qui a su transférer l’appui politique du peuple à celui des grandes familles, et bien que chassés par deux fois, les Médicis règnent en maîtres sur la cité. L’exposition est essentiellement consacrée à la période du 16ième celle qui correspond en partie au règne de Cosme 1ier époux de Léonore de Tolède…
C’est la rétrospective d’une période fastueuse, prenez l’audio-guide, il sera le complément idéal de cette découverte !
Dans le salon qui précède les salles d’exposition, un petit film d’introduction propose une étude des mains en peinture : Une analyse détaillée de la pose ou des écarts de doigts chez Bronzino, Del Sarto ou le Corrège, des observations fines et précises de chercheurs et historiens de l’art. Dans un vocabulaire suave et délicat, il est présenté des mains« blanches et distinguées, puissantes et douces, souples et nonchalantes », des mots égrenés au son d’un violoncelle qui sont déjà une incitation à la rêverie en même temps qu’une gourmandise visuelle.
Florence, portraits à la cour des Médicis, vous montrera en 5 salles une quarantaine de toiles, qui traduise l’évolution des styles, des mentalités et de la conception de la représentation du portrait dans l’art. Dans cette première section de parcours, les valeurs stoïciennes s’expriment dans les visages sévères d’hommes et de femmes qui exhortent à la pratique d’exercices de méditation et permettent de vivre grâce à la raison, à l’absence de passions afin d’atteindre la sagesse et le bonheur. "Savonarole", moine bénédictin instaurateur de la dictature théocratique sur la ville, est représenté de profil austère comme une effigie à l’antique. Dans un visage émacié par le jeûne et les pénitences, on perçoit toute la rigueur, l’intransigeance, le mysticisme de ce prédicateur exalté qui fait ériger le bûcher des vanités jusqu’à être excommunié et finir lui-même au bûcher des colères d’une ville étouffée sous le boisseau des privations…
Girolamo Savonarola - 1498 - Fra Bartolomeo Musée San Marco - Florence |
Puis, se succèdent des condottieri en armes, chefs militaires au service de Cosme, affirmant la puissance de la dynastie médicéenne.
Il faut observer au cours de votre avancée dans les salles, les différentes présentations des personnages. De face, de ¾, tenant des objets symboliques, ou encore un livre, un mouchoir, accompagnés ou non d’animaux, avec parfois en arrière-plan un paysage à la manière de Léonard de Vinci. Rien n’est laissé au hasard, la composition, la disposition, le cadrage, la posture, l’expression ou l’hermétisme d’un visage, les costumes, les accessoires… tout dans le détail du paraître rivalise de luxe et de raffinement.
200 ans auparavant, Dante Pétrarque ou Boccace avaient initié cette révolution de l’esprit pour donner naissance à l’humanisme, quand le toscan allait s’imposer comme langue italienne.
200 ans auparavant, Dante Pétrarque ou Boccace avaient initié cette révolution de l’esprit pour donner naissance à l’humanisme, quand le toscan allait s’imposer comme langue italienne.
Dans une présentation comme celle du musée Jacquemart, il y a toujours le regard qui se porte sur quelques tableaux particuliers, ils se révèlent être le témoin des transformations du siècle. Ce 16ième cultivé en est l’acmé et les références à découvrir sont littéraires, philosophiques voire musicales.
Laura Battiferri - 1555/1560 - Bronzino Palazzo Vecchio - Florence |
De Bronzino avec le portrait de "Laura Battiferri" et d’Andréa del Sarto au« Portrait d’une jeune femme au recueil de Pétrarque » toutes deux pointent du doigt le sonnet 68. Laura Battiferri de Bronzino nous dédaigne, et son profil au nez aquilin évoque celui de Dante. Dans la distance qu’elle met avec nous elle avoue son effusion, peut-être, une souffrance intime. La "jeune femme au recueil de Pétrarque" de Del Sarto fixe le spectateur d’un regard insistant et facétieux, nous rappelle que le chansonnier (ici dans le sens de troubadour) voyait dans le regard, le miroir de l’âme.
Jeune femme au recueil de Pétrarque - 1528 - Del Sarto - Galerie des Offices - Florence |
La traduction du sonnet 68 de Pétrarque étaye cette thèse de l’amour secret, voici ce qu’on y lit : « Quand je m’échappai de la prison où l’amour me tint pendant maintes années pour faire de moi ce qu’il lui plut, il serait long de vous raconter, combien me sembla pénible cette liberté nouvelle pour moi… Aussi bien des fois je me retournai en soupirant et je dis : hélas ! hélas ! Le joug, les chaînes et les fers étaient plus doux que de marcher ainsi sans entraves »
L’exposition Florence, portraits à la cour des Médicis est un tableau de la société cultivée du 16ième florentin. Par le choix des toiles proposées, les commissaires de l’exposition ont retracé les influences, l’art de vivre d’une époque riche de l’esprit humaniste.
C’est le portrait d’une société savante qui s’intéresse aux langues, aux littératures grecques et latines dans un courant culturel, philosophique, qui rêve d’un modèle humain aux qualités intellectuelles, sociales et affectives. Un courant optimiste, idéaliste dans un monde qui honore les valeurs humaines. Le livre du courtisan de Baldassare Castiglione, contemporain de ce siècle, illustre dans une conversation pleine d’esprit, de grâce et de désinvolture les trois grandes qualités d’un homme de cour.
Le "Double portrait" de Pontormo met en scène ces valeurs humanistes. Deux jeunes hommes tiennent un feuillet, il s’agit du Traité sur l’Amitié » rédigé par Cicéron en 44 av J-C. L’Amitié, avec un grand A, érigée au rang de vertu, celle qui requiert les qualités de patience, de modestie et de courtoisie et que l’on considère indispensable à la bonne marche de toute République. La toile est de 1522, elle est moins connue que les « Ambassadeurs » d’Holbein de 1533… 10 ans plus tard, l’Europe du Nord décline les mêmes valeurs et montre la diffusion d’une pensée, celle qui fait avancer le monde dans le souci du respect de l’autre.
Double portrait - 1522/23 - Pontormo - Fondation Cini - Venise |
Les œuvres « Florence, portrait à la cour des Médicis » exposées au musée Jacquemart-André font la part belle à Bronzino. Le peintre est souvent classé comme « maniériste » ce style se reconnaît aux couleurs acidulées, aux lignes serpentines et allongements excessifs des corps… pourtant les toiles proposées dans cette rétrospective seraient plutôt à classer dans le style « Bella Maniera », légère subtilité du langage pictural qui gomme les excès maniéristes et propose des contours délimités d’une précision extrême. Bronzino est un virtuose de la couleur par la réussite des coloris nacrés et des ombres savantes. La recherche de la beauté, de la perfection et de la précision s’y mêlent avec grâce et élégance.
"Le portrait d’Eléonore de Tolède", épouse de Cosme 1ier , grand- duc de Toscane offre au regard tous les critères du style de la Belle Manière.
Eléonore de Tolède - 1543 - Bronzino Galerie Nationale - Prague |
Eléonore de Tolède est représentée à mi-corps dans une robe aux reflets de rouge framboise, la main droite posée sur son sein en signe de fidélité conjugale, son image se détache sur un fond de bleu précieux. Elle porte une bague ornée d’un diamant que Cosme 1ier lui a offert lors de leur mariage, ainsi qu’une plus petite à l’auriculaire qui existe toujours dans les collections des Médicis. Le vêtement est rehaussé d’un tressage de fils d’or et de perles, comme l’est la coiffe qui ceint ses cheveux. Bronzino réalise ce buste dans un style qui a la faveur de la cour à l’époque. Il met en valeur l’origine aristocratique, efface toute émotion de son modèle jusqu’à le rendre froid, impersonnel avec un regard hautain. Le but est de distinguer le personnage, de traduire sa richesse, son statut social, sa majesté, sa distance. C’est un style glacé qui souligne l’appartenance à une caste.
La dernière salle abrite un grand portrait de "Marie de Médicis" de Santi di Tito. C’est le portrait d’une future reine de France, et le peintre a le devoir de faire figurer par sa mise en scène, le haut rang de celle-ci dans la société par la somptuosité de la mise, les bijoux, et tous les codes de représentation en usage à cette époque.
Un dernier portrait qui oppose richesse et rigueur avec celui de Savonarole en première salle.
Je vous invite à faire la découverte de cette galerie de représentations qui donne la mesure de l’évolution du genre.
L’exposition « Florence, portraits à la cour des Médicis » se termine le 25 Janvier 2016, allez découvrir cette magnifique exhibition.
Sur RCF 51 Marne Meuse, vous retrouverez mon propos, avec les extraits des morceaux musicaux de
Sur RCF 51 Marne Meuse, vous retrouverez mon propos, avec les extraits des morceaux musicaux de
Girolamo Frescobaldi, musicien qui a séjourné à la cour des Médicis de 1628 à 1634.
Au revoir, à bientôt.
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